Chili : Plus que les séismes, c’est le capitalisme qui a écrasé le peuple !

Chili :

Plus que les séismes, c’est le capitalisme qui a écrasé le peuple ! 

(2ème partie)

L’élection du millionnaire Sebastian Piñera (*) à la tête de l’État aura marqué donc la fin de la -mal qualifiée- « période de transition démocratique », menée pendant vingt ans par les partis de la Concertation (PS, DC et PH).

Car il faut plutôt parler d’une période de consolidation de toutes les institutions mises en place par Pinochet : la Constitution de 1980, le système de représentativité politique, la destruction du code du travail, la loi d’amnistie pour les tortionnaires et -surtout- la consolidation du modèle économique néolibéral. Une période durant laquelle on fit la part belle aux privatisations, à l’ouverture économique aux multinationales et à la marchandisation des services assurés par l’État avant la dictature.

C’est donc grâce à la politique de collaboration des classes exercée par les gouvernements dits de «Concertation », que le modèle hérité du pinochetisme est un modèle aujourd’hui cristallisé, approfondi : le modèle néolibéral chilien n’a pas de souci à se faire dans l’immédiat.

Il ne s’est pas adouci, seulement ses ravages frappent un peuple endormi par un semblant de démocratie qui ne profite qu’aux détenteurs du capital.

Si par le passé, le secteur privé, le patronat -chaque jour plus puissant- n’avait rien à craindre de la social-démocratie aux commandes durant vingt ans, aujourd’hui les investisseurs étrangers -les parasites des fonds de pension, les spoliateurs de la finance et du capital international- peuvent se frotter les mains. Après les portes ouvertes par Pinochet et les socio-démocrates, Piñera leur déploie sans états d’âme le tapis rouge qui les mène au pillage, à l’appropriation totale de l’industrie nationale (du moins, de ce qu’il en reste). Sont visées à court terme les industries minières, hydraulique, du bois… Des territoires immenses sont mis -presque gratuitement- à la disposition des investisseurs étrangers, des prospecteurs avides, des pollueurs en tout genre. La bourgeoisie chilienne reste toujours à la botte du capital étranger, fidèle à sa fonction parasitaire : courtier pour l’impérialisme mondial.

Et ce ne sont pas les effets d’annonce, ni les hypothétiques taxes annoncées par le nouveau président pour -soi disant- financer la reconstruction, qui vont arrêter le déferlement de ces professionnels du saccage : les axes du modèle économique imposée par Pinochet sont toujours en vigueur. Surtout maintenant que les idéologues de la Constitution de 1980 sont de retour au pouvoir. Et que leurs détracteurs de l’époque sont devenus les défenseurs les plus acharnés du système actuel.

De toute façon, la reconstruction est une manne pécuniaire qui profitera essentiellement au secteur privé.

Le tremblement de terre a dévoilé une réalité longtemps occultée afin de vendre au monde entier le « modèle économique chilien » : l’abîme séparant pauvre et riche apparaît brutalement au grand jour.

L’image idyllique, véhiculée par la bourgeoisie nationale et relayée par les médias internationaux, celle « d’un pays en développement continu depuis 20 ans et à la misère éradiquée », est mise à mal par les reportages effectués à la suite du récent tremblement de terre : la misère est criante dans les secteurs ruraux et dans les périphéries urbaines.

Héritage de la dictature militaire, puis patronale, le Chili est un champion de l’inégalité en Amérique Latine en matière de redistribution de richesses. En 2008, il se maintient en troisième position, juste derrière le Brésil et la Colombie. Car si, en 1967, les hauts fonctionnaires, la bourgeoisie commerçante, les propriétaires terriens et les professions libérales représentaient 20% de la population et s’appropriaient 40% du revenu national, aujourd’hui la concentration de richesses ne cesse de s’accroître et 10% seulement des plus riches mettent dans leurs poches 42,5% du revenu national. Ce, dans un pays où plus de la moitié de ceux qui travaillent gagne moins de 400 euros par mois…

La santé, l’éducation publique, le logement, souffrent depuis l’ère Pinochet de l’absence chronique de ressources. Mais en revanche, le Chili dépense 4% de son P.I.B dans l’acquisition d’armes, le plus haut pourcentage de la région… Ne se profilant pas de menace sérieuse venant de l’extérieur, l’ennemi serait-il à l’intérieur ? Les travailleurs ?

Profitant de la situation de catastrophe naturelle, pour maintenir les bénéfices des actionnaires les entreprises licencient à tout va. Et le chômage qui, avant le tremblement de terre touchait déjà un million de chiliens, croît de jour en jour : plus de 130 mille travailleurs ont perdu leur emploi depuis le 27 février et le ministre de l’Economie, A. Fontaine, vient d’affirmer que, dans les seules VI, VII et VIII régions, on risque de perdre 840 mille postes de travail. L’assurance chômage vient -il est vrai- d’être étendue de 5 à 7 mois, mais ceux qu’en bénéficieront constituent une minorité. Alors que -pour l’emploi- les conséquences du tremblement de terre se feront sentir pendant des mois, voire des années.

Livrer aux appétits des pilleurs un pays pacifié, une classe ouvrière démobilisée et sans organisation syndicale digne de ce nom, des travailleurs abrutis par le consumérisme, (on compte au Chili 17 millions de téléphones portables !) et souffrant, aussi, de la quasi inexistence de partis politiques capables de proposer une alternative révolutionnaire, voilà le véritable rôle joué par les précédents gouvernements post-Pinochet. Voilà comment les partis de la Concertation ont fait le lit de la bourgeoisie affairiste et préparé son retour au pouvoir !

Au Chili comme ailleurs, c’est le rôle historique des socio-démocrates. Celui d’être les fossoyeurs de toutes les aspirations et espérances des prolétaires. Celui de faire barrage -pour préserver l’ordre bourgeois- à toute expression révolutionnaire du mouvement ouvrier.

Les « veines ouvertes de l’Amérique Latine » ne cessent d’abreuver -du sang de leurs travailleurs- les gueules assoiffées d’une poignée d’oligarques et de groupes financiers internationaux. Fernando

(*) Il fallait lire 720ème fortune mondiale et non pas vingt septième !

FERNANDO

Publié dans Combat n°13 Mai/Juin 2010

(Lire la 3ème partie) 

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