Economie en faillite ? Liquidons le capitalisme !

Economie en faillite ?

Liquidons le capitalisme !

 

Alors que les G20 et les sommets se succèdent, les dirigeants européens se sont lancés dans des politiques d’austérité de plus en plus dures : baisse des salaires, hausse de la TVA, nouveaux impôts, plans de licenciements, attaque des conventions collectives et du droit du travail, privatisation des services publics, baisse des budgets dans l’éducation et la santé, c’est une véritable guerre déclarée aux travailleurs et aux populations.

Tandis qu’en France et en Allemagne les réactions sont trop ponctuelles et limitées, en Grèce où la situation était déjà catastrophique pour les travailleurs, les grèves sont quasi quotidiennes.

Comment est-on arrivé là ?

« Par la dette de nos Etats », claironnent en coeur nos dirigeants, « parce que cela fait des années que vous vivez au-dessus de vos moyens » nous disent-ils, « et qu’en plus, vous fraudez le fisc, l’assurance chômage et la sécu, bande d’enfoirés ! »

La dette est la nouvelle arme idéologique et financière entre les mains de la bourgeoisie afin de récupérer retraite, sécu, acquis sociaux et entreprises publiques concédée aux travailleurs au prix d’une lutte de classes élevée et du sang versé par les travailleurs lors de deux guerres mondiales. Autant de marchés potentiels qui échappent aux capitalistes, ces gentils investisseurs qui veulent gentiment faire de l’argent, ces garants de la croissance, ces patrons qui font avancer le monde !

Mais aujourd’hui la situation est mûre pour que la bourgeoisie récupère ses billes. L’Union Soviétique a disparu et, avec elle, tout le projet révolutionnaire du prolétariat a été liquidé. Le mouvement de lutte et les organisations des travailleurs ont été atomisés, déstructurés, précarisés, marginalisés. En attendant que le peuple se réarme du projet révolutionnaire, que les organisations se reconstruisent afin d’être en mesure de contester les perspectives déprimantes que la société capitaliste nous offre, la bourgeoisie a les mains libres pour accumuler les richesses et nous replonger 150 ans en arrière, aux conditions de vie du prolétariat du 19ème siècle.

En ce moment ils agitent un nouvel épouvantail : la crise de la dette publique.

Comme ce fut le cas en 2008, la crise arrive par les banques et l’éclatement de la bulle financière spéculative gonflées par cette nébuleuse que l’on appelle « monde de la finance », dont font partie les fonds d’investissement (hedge fund et fonds de pension) et les fameuses agences de notation. Ces officines sont des émanations des banques elles-mêmes. Elles sont indissociables du système bancaire qui les a créés.

Pour que l’économie capitaliste tourne, il faut que les entreprises produisent toujours plus et donc que l’humanité consomme toujours plus. D’où le problème systémique des débouchés pour les produits que l’on doit vendre, aspect fondamental de l’impérialisme « stade suprême » du capitalisme comme le disait Lénine.

Lorsque les capacités de production dépassent la capacité d’absorption du marché il y a crise. Après une phase d’ascension de la production, s’ensuit une chute brutale, les prix baissent, le taux de profit sur le marché en question dégringole, et seuls les plus gros ont la capacité de résister à cet effondrement. Mieux, ils ont la possibilité d’absorber et de concentrer en leur sein les cadavres des perdants. La production et les prix repartent alors sur une base plus adéquate à la demande réelle, aux besoins réels du marché. Pour s’assurer de prix élevés et donc un bon taux de profit, il faut pourtant que le capitalisme veille à ce que la demande soit toujours supérieure à l’offre. Telle est -pour la bourgeoisie- la quadrature du cercle du système capitaliste. Telle est -pour le peuple- l’absurdité d’une économie capitaliste qui, tout en développant les forces productives, doit organiser la pénurie.

Les crises se succèdent à intervalles réguliers, des bulles se créent puis éclatent de façon cyclique ; elles représentent les marchés où s’engouffrent les capitalistes -tous en même temps- dans le but de produire les mouvements financiers grâce auxquels ils peuvent réaliser de larges profits à court terme. Le capitalisme « financier » n’est qu’une composante de ce système global, il permet le gonflement rapide de ces bulles spéculatives et en provoque l’éclatement. Dans les deux phases ils s’enrichissent. Les crises régissent le système capitalisme comme la marée régit la mer.

Mais il n’y a que les apôtres de la bourgeoisie pour ériger le capitalisme en force de la nature.

Après l’éclatement de la bulle internet en 2001 et le krach qui s’en suivit, les capitalistes durent trouver un autre marché capable de convaincre les investisseurs. Leur regard se posa sur l’immobilier et, plus particulièrement, le secteur du logement (l’immobilier d’entreprise -les bureaux- ayant déjà connu un krach en 1997)

Souvenez-vous, on nous rabâchait les oreilles avec des discours affirmant que la pierre est un investissement sûr, une valeur qui ne fait qu’augmenter etc.… Une fois la demande solvable (la petite et moyenne bourgeoisie) épuisée, les banques décidèrent d’embarquer tous le monde (le prolétariat) dans le train des dépenses y compris les travailleurs les plus pauvres. Pour cela ils firent miroiter -même aux plus pauvres- cette aspiration petit- bourgeoise qu’est l’accession à la propriété. Comme si devenir propriétaire de son logement était la garantie de ne jamais finir à la rue.

Les organismes de crédits mirent au point des crédits hypothécaires à taux variable. L’hypothèque étant sensée apporter les garanties suffisantes pour ceux dont les revenus étaient trop faibles ou ceux qui n’en avaient pas du tout. Le crédit a toujours été un outil du capitalisme pour accroître artificiellement la demande. Ces créances furent alors transformées par les banques en produits financiers complexes (« titres ») échangeables sur les marchés comme n’importe quel autre produit et vendus un peu partout. Le marché mondial fut alors inondé de ces « titres » risqués mais qui pouvaient rapporter gros. Les fonds d’investissements se jetèrent sur ces titres, empruntant même pour en acheter davantage. C’est la phase ascendante. Quand le débiteur fait défaut (est incapable de rembourser ses dettes) ou simplement que les banques considèrent que le risque de qu’il fasse défaut est trop grand, la valeur de la créance titrisée dégringole, mettant en péril le fonds qui doit de nouveau emprunter pour financer ses pertes et continuer son activité (comme assurer le paiement des retraites de ses cotisants, dans le cas des fonds de pension). Seulement, une panique -justifiée- s’empare des banques qui refusent de prêter de nouveau et le fonds fait faillite. Les banques tentent alors de se rembourser en récupérant le bien immobilier qui a perdu une partie de sa valeur et accusent alors une perte. Voilà comment des millions d’américains ont perdu à la fois leurs maisons et leurs retraites. A leur tour, les banques se retrouvent en difficulté. Elles ont tout à coup besoin d’argent et se tournent vers les marchés financiers.

Comme sur les marchés les banques se prêtent constamment entre elles, chacun essaie de masquer ses pertes pour garder la confiance de ses partenaires. Mais c’est un secret de polichinelle et les banques se méfient, car elles estiment que la situation de leurs homologues est très dégradée étant donnée la nature de leurs engagements.

Elles refusent donc de se prêter, ou alors, à des conditions très dures. Et lorsque les banques ne trouvent plus de fonds privés pour les renflouer, elles appellent les Etats à leur secours.

Nous y voilà ! Que ce soit le Trésor américain ou les Etats européens, chacun s’active pour sauver ces mastodontes du capital que sont les banques. Les banques centrales doivent inonder le marché de liquidités et la France de « trouver » 360 milliards pour assurer le bon fonctionnement de ces organismes trop gros pour faire faillite dans ce système capitaliste !

La crise se diffuse donc et creuse des trous béants dans les budgets, tous les Etats ont aggravé leur endettement dans des proportions colossales. Tandis que pendant des années les capitalistes se sont goinfrés avec ce système -comme en témoignent les dividendes perçus par les actionnaires et les bonus de leur armée de traders- quand leur château de carte s’effondre, ils en appellent aux Etats pour sauver le système, pour -en somme- socialiser les pertes énormes du secteur privé.

Ajoutons à cela la baisse constante des recettes fiscales liée à la privatisation des entreprises publiques rentables, aux exonérations massives, à la multiplication des niches fiscales, aux évasions de capitaux dans les paradis fiscaux et une législation en faveur des plus grosses multinationales (qui pour la plupart ne payent pas un centime d’impôt) et l’on comprend mieux l’énormité de la dette que l’on fait peser sur les épaules des populations.

La dette publique est du pain béni pour les banques et les groupes financiers : les Etats doivent s’endetter toujours plus et payer toujours plus d’intérêts, à tel point que les Etats empruntent aujourd’hui non pas pour assurer leur fonctionnement, mais pour payer les intérêts de leurs dettes. Voici les véritables raisons de l’explosion des dettes publiques, d’autant plus que les Etats sont obligés d’emprunter sur les marchés financiers à des taux fixés par ces derniers.

Après avoir joué avec les dettes des ménages américains, les banques jouent avec la dette des Etats. Elles créent de la même façon des produits financiers, des titres représentant ces créances et des assurances pour garantir ces créances. Il faut maintenant créer du mouvement (spéculer) sur ces marchés pour pouvoir faire de l’argent, parier à la hausse ou à la baisse. Car créer des situations de crise et de panique fait varier les cours et les taux d’intérêts, ce qui est une source de profit énorme pour les spéculateurs. De plus, cette panique est une arme redoutable entre les mains des banques. Lorsque les agences de notation dégradent la note d’un Etat, les banques augmentent leur taux d’intérêt et, par-là, mettent un couteau sous la gorge des gouvernements pour imposer leurs exigences : payer les intérêts de la dette.

Pour obtenir l’argent nécessaire, l’Etat doit réduire le coût social, vendre les entreprises publiques. Les banques ont mis en place un système financier automatisé dans lequel elles sont gagnantes à tous les coups, mais qu’elles ne maîtrisent plus. La seule panique qui existe est celle des investisseurs, qui, à force d’étrangler les Etats à coup de taux d’intérêts, se disent qu’il sera impossible pour tel ou tel de les payer tous. C’est à dire, non pas de rembourser les sommes empruntées, mais de régler les intérêts exorbitants qui s’accumulent de façon exponentielle.

En fait, le but de ces réunions Sarkozy-Merkel n’est pas de « sauver la Grèce » ou de « sauver l’euro » mais de sauver les bénéfices des banques françaises et allemandes qui se sont jetées comme des vautours sur les titres de la dette grecque. L’Etat grec serait en « faillite », alors on liquide les biens et services publiques, on rackette la population.

Nos chefs d’Etat ont présenté les marchandages à Bruxelles comme une victoire sur le monde financier. Les banques acceptent de réduire de 50% leurs créances sur l’Etat grec, ce qui correspond en réalité à une diminution de 28% de la dette publique. En contrepartie, l’Etat grec durcira ses plans d’austérité et orientera ses fonds publics en priorité sur le remboursement de la dette. Mais surtout -et c’est le plus important- les banques seront aussi recapitalisées sans aucune entrée des Etats dans le capital. Des garanties publiques seront mises en place afin de permettre aux banques de s’assurer des financements à moyen et long terme, comme lors de la crise 2007-2008. L’UE estime à 10 milliards d’euros les besoins de recapitalisation des banques françaises. Très exactement le montant des dividendes distribués entre 2008 et 2010 par les trois plus grandes banques françaises. Loin d’être un cadeau, les banques s’assurent en réalité du bon paiement de leurs titres, alors que ceux-ci se négocient déjà avec une décote de 50% voir 60% sur les marchés financiers.

On comprend donc que la manœuvre est loin d’être un cadeau. D’ailleurs, la BNP évalue à 1,2 milliards d’euros une décote de 30% de la dette, soit moins de la moitié de ses bénéfices trimestriels. C’est donc bien la mise sous tutelle des Etats par les banques qui est garantie lors de ces sommets européens.

A la recherche d’un taux de profit maximal, les marchés financiers jettent leur dévolu sur tel ou tel secteur de l’économie, aujourd’hui la dette des Etats. A créer de l’argent à partir de rien, ils engendrent des bulles spéculatives dont la seule régulation possible est la crise. Lors de l’explosion de la bulle chacun essaye de convertir ses bouts de papier sans valeur réelle en monnaie sonnante et trébuchante. Où trouver cet argent ? Dans les poches de la population, en expropriant, en baissant les salaires et en augmentant les impôts. Les marchés tournent ensuite leur regard sur une autre branche de l’économie. Les populations n’ont pas fini de souffrir. Rien n’est en mesure de réguler, ou même contrôler, cette machine infernale. Elle suit sa propre logique. Le capitalisme est un système économique global avec lequel rien ne peut coexister. C’est un rapport à la propriété privée de la production. C’est en vertu de ce « droit » que les capitalistes s’approprient les richesses créées par les travailleurs. Les intérêts des capitalistes sont diamétralement opposés à ceux des travailleurs. Ce que gagnent les premiers sera toujours une perte pour les seconds. La tache politique de la bourgeoisie a toujours été d’enfermer cette guerre économique dans le cadre des institutions existantes.

Les organisations d’extrême gauche opportunistes (NPA), ou celles qui se limitent aux revendications salariales (LO), et les syndicats, sont incapables de gagner largement le peuple au projet révolutionnaire socialiste. Ils ont, volontairement, privilégié ces luttes économiques et abandonné la propagande et l’agitation communiste.

Nous clamons la nécessité de que -de tous ces mouvements économiques- naisse un mouvement politique, c’est-à-dire un mouvement de la classe ouvrière pour faire triompher ses intérêts dans une autre société, avec forcément d’autres institutions, celles élaborées par et pour le peuple.

Ce projet, cette révolution, ne tombera pas du ciel et aucun messie ne viendra à notre secours. C’est à nous de nous organiser dans les syndicats, dans le parti des travailleurs et porter haut le programme socialiste !

NEYA

Publié dans Combat n°24 Novembre/Décembre 2011

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