Ecotaxe, la quenelle de l’environnement !
L’écotaxe pour les poids lourds a été adoptée lors de la farce du Grenelle de l’environnement en 2008 sous Sarkozy. Plutôt que d’imposer le transport d’une partie du fret par le rail ou les voies fluviales, la réponse du gouvernement fut la création d’une nouvelle taxe.
Une solution qu’affectionnent particulièrement les économistes libéraux tant ils peuvent la reporter, au final, sur le consommateur. Une mesure similaire avait déjà était mise en place en 2006 sur les appareils électriques. Le système de malus sur l’achat d’une voiture ou la taxe carbone relevaient de la même logique. Ces taxes sont censées alimenter la politique hypocrite des gouvernements en ce qui concerne l’écologie en voulant nous faire croire à la justesse du principe pollueur/payeur. Loin de décourager quelques comportements que ce soient, ce type de fiscalité apparait plutôt comme un droit de polluer pour ceux qui ont le plus d’argent.
Cette écotaxe aurait dû frapper les 600 000 véhicules français et 200 000 véhicules étrangers dépassant 3,5 tonnes qui empruntent certaines parties du réseau routier français (15 000 km sur les 978 000km du réseau). Mais à la suite du mouvement des bonnets rouges bretons, le gouvernement Ayrault a finalement décidé de suspendre son application le temps de mettre en œuvre quelques aménagements profitables aux entreprises. Sans doute de nouvelles exonérations sectorielles à venir, rappelons que la Bretagne bénéficie déjà -et c’est la seule région- d’un abattement de 50 %. Mais les gouvernements de droite comme de gauche sont toujours plus disposés à céder au patronat plutôt qu’aux travailleurs.
Certes, un impôt de plus, ça ne fait plaisir à personne. Ce type de taxe totalement inégalitaire touche plus lourdement les plus faibles. Il n’y a qu’à voir le poids que représente la TVA sur les foyers les plus démunis sans parler du fait que les plus riches s’arrangent toujours pour l’esquiver et que les entreprises du CAC 40 ne la payent quasiment pas.
Mais ce qui n’est en revanche pas mis en cause par le patronat breton c’est la magouille du partenariat public-privé mise en place afin de collecter le produit de cette taxe. Car c’est la première fois qu’une collecte d’impôts est confiée à des entreprises privées. Un consortium baptisé Ecomouv’ mené par Autostrade per l’Italia a été monté dans ce but. Le groupe italien est une filiale d’Atlantia, la société qui gère la plupart des autoroutes italiennes, lui-même détenu par un fond d’investissement propriété de la famille Benetton dans lequel vient de rentrer la fameuse banque Goldman Sachs. Ce consortium réunit d’autres groupes français comme Thales, SNCF, SFR, tous ont flairé la bonne affaire. En effet la petite bande empochera 20% des recettes de la taxe pour assurer son recouvrement, environ 230 millions d’euros par an pendant 14 ans. Soit 3,9 milliards pour un investissement de 650 millions ! C’est la taxe la plus coûteuse jamais mise en place. A titre de comparaison, le recouvrement d’un impôt coûte souvent moins de 1% du montant de celui-ci. De plus il est déjà prévu qu’en cas d’abandon de cette taxe, Ecomouv’ devra alors être indemnisée… à hauteur d’un milliard d’euros ! C’est le jackpot pour ces entreprises et ce n’est pas fini !
Avec l’écotaxe, le ministère des Transports s’attend à une augmentation de 15 à 20 % du trafic poids lourds sur les autoroutes celles-ci n’étant pas concernées. Une recette estimée à 400 millions d’euros par an pour les sociétés gérant les autoroutes, principalement Vinci et la Sanef ! Présentée comme une mesure écologique c’est un véritable racket qui s’organise. Déjà mis en place en Allemagne le consortium Toll Collect (dont fait partie Vinci !) annonce un bénéfice net de 80 millions d’euros en 2012 tandis que l’État allemand lui réclame 5 milliards depuis 2004. En Slovaquie c’est Sky Toll (dont fait partie la Sanef !) qui gère le dispositif en prélevant 110 millions d’euros sur les 141 millions récolté en 2010. Comme à chaque fois que l’Etat nous parle d’écologie il s’agit surtout de permettre au capital financier de faire toujours plus d’argent.
Publié dans Combat n°33 Hiver 2013/2014