Bonnet rouge ou benêt jaune ?

  • Auteur/autrice de la publication :
  • Post category:Non classé
  • Commentaires de la publication :0 commentaire

Bonnet rouge ou benêt jaune ?

 

La situation de l’emploi est dramatique en France. Les fusions-acquisitions, les délocalisations, la casse des services publics, la casse du CDI, l’explosion de la sous-traitance et du recours à l’intérim, laissent sur le carreau de plus en plus de travailleurs et leurs familles.

Pour ceux qui ont encore un emploi, les conditions se dégradent chaque jour avec les réductions d’effectifs, l’augmentation de la charge de travail et de la pénibilité, sans parler de la baisse généralisée des revenus des travailleurs. C’est un chantage permanent afin de nous livrer corps et âmes aux intérêts du capital. Car si les travailleurs sont de plus en plus pauvres, la bourgeoisie est de plus en plus riche ! En quelques mois, en Bretagne, se sont 8 000 personnes employées dans l’agro-alimentaire qui furent licenciées au nom des profits des grands groupes comme Doux, Gad, Tilly ou Marine Harvest. Tous, pourtant, affichent déjà de larges bénéfices ! Mais qui viendra se dresser contre eux ? Ce sont eux qui font la loi et qui nous dépossèdent de nos vies. S’ils disposent librement de nos existences d’esclaves c’est que nous sommes incapables de nous révolter et d’imposer nos choix. Nous sommes bridés par des directions syndicales traitresses et des organisations politiques incapables de développer une ligne de classe propre et révolutionnaire. Le mouvement des Bonnet Rouges du mois de Novembre en est le triste résultat.

Les manifestations de Quimper du 2 et du 30 Novembre illustrent comment la bourgeoisie organisée manipule la population. Aujourd’hui ce sont les licencieurs, les patrons d’entreprises du transport, de l’agroalimentaire et de la distribution qui voudraient se poser en défenseurs de l’emploi ! Le Medef breton et la FNSEA aux bottes des groupes de l’agro-alimentaire sont les organisateurs de ces manifestations sous le mot d’ordre « Vivre, décider et travailler en Bretagne ». Autrement dit ce sont les mêmes qui, hier, ont conduit des milliers d’agriculteurs à l’exode hors de leur région natale. Ce sont eux qui ont imposé ce type d’industrialisation productiviste de l’élevage qui ravage la santé des travailleurs et les écosystèmes ! Enfin, se sont eux qui ont pillé les ressources du littoral breton. Tous ceux-là voudraient nous faire avaler leur discours mensonger et toujours plus libéral.

Lors de ces démonstrations beaucoup d’interventions contre les taxes et les « charges » en général ainsi que sur la fierté d’être breton. Quel beau programme ! Pour tous les laquais de la bourgeoisie, la seule préoccupation est la baisse du coût du travail. Ça commence avec les taxes et demain ça continue avec les salaires. Zéro impôt, des subventions à gogo pour le moindre investissement ou l’entretien des infrastructures et le SMIC roumain pour les employés, voilà leur objectif !

Bien entendu les poujadistes du 21ème siècle applaudissent des deux mains. Tous les petits agriculteurs, artisans, pêcheurs et petits transporteurs sont bien les idiots utiles de la politique. Ils avaient moins de scrupules à l’époque où ils rachetaient l’exploitation de leurs voisins. Ils ne se souciaient guère de la Bretagne quand ils se sont soumis au diktat des grandes firmes de l’agro-alimentaire, Monsanto en tête.

Ils crachaient sur les travailleurs bretons quand, à la promesse d’un peu de pognon, ils organisaient la sous-traitance pour la grande distribution. Ils sont nombreux ces travailleurs, à la mentalité petite-bourgeoise, à croire qu’ils vont faire du fric avec un petit bizness. Mais voici qu’ils déchantent quand ils se rendent compte qu’ils sont asservis par les banques et les grands monopoles de la distribution. Les monopoles capitalistes leur expliquent comment s’endetter pour se moderniser afin de produire plus et moins cher puis leur imposent un prix d’achat pour ce qu’ils produisent. Tous ces petits producteurs n’ont plus le choix ils doivent absorber leur concurrent ou se faire absorber, quand ils ne sont pas contraints à mettre la clef sous la porte. Tel est le schéma invariable du capitalisme qui ridiculise chaque jour la naïveté libérale.

Maintenant que la révolte gronde, que l’insatisfaction se généralise à tous les travailleurs qu’ils soient salariés ou indépendants, ce sont les patrons et les hommes politiques à leurs bottes qui prétendent se faire la voix du peuple. Les organisations ouvrières et les syndicats ont tenté d’y répondre, mais trop tard. Les centrales syndicales ont abandonné les travailleurs à leur sort en cloisonnant les luttes pour éviter un mouvement d’ampleur qui ne demandait qu’à éclater. Et elles persistent dans leurs manœuvres et leurs stratégie de dispersion ! La nécessité de l’organisation d’une manifestation séparée était évidente, or l’intersyndicales en a planifié quatre le même jour en des lieux différents ! Pour éparpiller le mouvement on ne fait pas mieux ! Quant aux organisations ouvrières, leur rôle et leurs actions ne sont pas beaucoup plus reluisantes. Elles appellent à « de nouvelles perspectives » pour « une issue progressiste » quand elles sont incapables de formuler un projet de société clair -à l’instar du NPA- ou bien elles attendent « autre chose » quand elles ne sont pas capable de le défendre auprès des masses comme Lutte Ouvrière. Toutes ces faiblesses et ces insuffisances de la part des organisations de défense des travailleurs –syndicales et politiques- se répètent mouvement après mouvement et gouvernement après gouvernement. Nous n’attendrons pas un syndicat révolutionnaire ou la constitution d’un parti des travailleurs fort pour clamer bien haut le seul projet capable de porter les intérêts des travailleurs : le socialisme. C’est uniquement par la prise du pouvoir par le peuple et la dictature du prolétariat que nous pourrons vivre, décider et travailler ensemble. Défendre ce projet c’est commencer par tracer une ligne de démarcation net entre ceux qui ont le pouvoir et ceux qui le subissent. Etre avec les travailleurs ce n’est pas se placer à la remorque de n’importe quelles agitations, au coté des jaunes et des patrons.

Notre rôle de révolutionnaire n’est pas de participer aux manifestations des « bonnet rouges », même au sein d’un « pôle ouvrier », mais d’agir activement au sein des intersyndicales pour remettre en cause les tactiques de défaite et de collaboration, afin de porter de nouvelles perspectives de lutte salariée indépendante et victorieuse !

NEYA

Publié dans Combat n°33 Hiver 2013/2014

Voir aussi :

Ecotaxe, la quenelle de l’environnement !

Laisser un commentaire