SNCF :
Pendant que les salariés luttent,
les directions syndicales capitulent !
Du 6 avril jusqu’aux alentours du 20 selon les secteurs et les régions, les travailleurs de la SNCF ont mené la plus longue grève dans cette entreprise depuis les 2 dernières années.
Grève à l’appel de la CGT et de SUD, plus ou moins suivie selon les régions, mais qui aura eu le mérite d’être par endroits (conflit très suivi dans le sud) très combative. Les grévistes s’opposent à la suppression de postes, à un encadrement de plus en plus inhumain, à une dégradation des conditions de travail des employés (la direction s’amusant de plus en plus à contourner la réglementation en vigueur) et aux projets gouvernementaux de privatisation du rail et de réforme des retraites.
La suppression de postes déjà est une réalité à la SNCF, avec 220 000 emplois en moins depuis 2002 ! Politique qui est en train de devenir dangereuse même pour les usagers. Comment expliquer que des postes liés à l’entretien du matériel, nécessitant des connaissances particulières, soient confiés à des intérimaires ? Les intérimaires sont flexibles, ils ne se mettent pas en grève, ne peuvent pas (trop) protester. La direction de la SNCF y trouve son intérêt. Jusqu’au jour ou des accidents dus à un matériel mal entretenu surviendront…
La privatisation, elle, est déjà en cours. On fait en France aujourd’hui ce qui a tué le rail anglais il y a 20 ans. L’Angleterre n’est pas encore revenue de la privatisation catastrophique des années Thatcher et la SNCF se jette dans le même genre de projet qui mène au désastre. Séparation des activités du rail, partagée entre différents entreprises, séparation des logistiques par les différentes régions qui maintenant s’occupent du service TER… Un service public est en train d’être confié à des entreprises aux intérêts privés, d’être démantelé par secteurs, mis en concurrence ! La communication dans l’entreprise ne se fera plus de la même façon, et là encore cela pourrait engendrer des risques liés à la sécurité des usagers !
Ces politiques basées sur la logique du profit et le désinvestissement de l’Etat jouent avec la sécurité, provoquent l’augmentation du prix des billets, tout ça soit disant pour faire face à la concurrence. Mais comment osent-ils parler de concurrence, ceux-là même qui ont mis le rail sur le marché !
Pendant près de 3 semaines, la direction de l’entreprise encore publique, ainsi que l’État, ont tout joué sur le pourrissement de la situation. Et ils ont malheureusement réussi. Les directions de la SNCF et les TER sont restés sourdes aux revendications. Usés, ou parfois trahissant les cheminots, les syndicats ont cependant stoppé la grève. Alors qu’ils n’ont récolté que quelques promesses de postes supplémentaires, qui de toute façon étaient déjà prévus avant le conflit. Les directions syndicales encore une fois se sont faites les alliées d’une direction sourde au cri d’alarme des employés. La CFDT et FO, les deux grandes centrales ne s’étant investies dans le mouvement, se permettant même -à l’instar du gouvernement- de blâmer les grévistes qui n’ont pas repris le travail suite à la paralysie du trafic aérien !
Les cheminots auront mené une lutte exemplaire, auront perdu des jours de salaire, encore une fois, pour rien !
Mais ils se sont endurcis. Ils prennent conscience de la nécessité de la lutte malgré la défaite et la trahison syndicale. Et espérons qu’ils auront les ressources nécessaires pour empêcher les projets de casse du rail du gouvernement et de la direction de la SNCF.
Pour eux, pour leurs emplois et aussi pour la sécurité des usagers. Pour garder un service public de qualité ! Parce qu’un service public ne doit jamais être livré à des profiteurs !
Après un conflit social aussi combatif mais perdu, les cheminots prennent conscience qu’ils devront à l’avenir sortir des voies légales pour obtenir ce qu’ils demandent ! Suite à la fin de la grève, quelques incidents ont éclaté (incendies sur les voies), symptomatiques du ras le bol de ceux qui se voient trahis après 3 semaines de grève, sans ressources (primes et paiement de certains jours de grève catégoriquement refusés). Les cheminots devront aussi apprendre à convaincre ceux qui travaillent quand il y a grève (les « jaunes ») à se joindre au mouvement. Et à les y obliger s’il le faut ! Dans le sud, alors que la participation à la grève était très importante, les trains ont continué à circuler aux heures de pointe.
Ce ne sont pas les retards et l’annulation des trains de période creuse qui mettront la SNCF au pied du mur. C’est le jour ou absolument aucun train ne circulera ! Le taux de grévistes était certes important, mais il doit encore augmenter sur les prochaines luttes. Les cheminots grévistes ne doivent plus tergiverser et doivent maintenant être en mesure de contraindre leurs camarades non-grévistes à leur emboîter le pas, pour ne pas continuer les sacrifices pour rien!!! Et ils devront faire vite, avant qu’il n’y ait plus que des intérimaires et des CDD qui fassent tourner l’entreprise. La grève est un droit, c’est aussi un devoir, un devoir de solidarité avec ceux qui se sacrifient pour sauver des postes, avoir des conditions de travail dignes et garantir le service public !
KOMA
Publié dans Combat n°13 Mai/Juin 2010